Un conte de Noël - Charles Dickens (A Christmas carol)
Ebenezer Scrooge n'aime pas Noël. D'ailleurs il ne semble guère aimer quoique ce soit. Depuis sept ans jour pour jour en cette veille de Noël que son associé Jacob Marley est mort, il travaille derrière son bureau à peine chauffé au point que son commis Bob Cratchit se réchauffe les doigts à la flamme d'une bougie. Car Scrooge est un radin, qui refuse d'user son argent à payer du charbon. Il refuse l'invitation de son neveu au repas de réveillon, envoie paître des gens qui font la quête pour les démunis (qui n'ont qu'à mourir ça fera de la place, ou un truc dans le genre), rejette un enfant et accepte presque en s'etouffant d'offrir un jour de congé à son commis avant de rentrer chez lui, seul. Il neige il fait froid c'est l'hiver à Londres. Le marteau de sa porte se transforme en tête de Jacob et la porte de sa cave s'ouvre dans un grand fracas. Balivernes ! Ou sornettes ! Sauf qu'apparaît le fantôme enchaîné de Jacob Marley qui prévient Scrooge que s'il ne change pas d'attitude il finira comme lui, dans les enfers. Il lui annonce la visite de trois fantômes et l'invite à ne pas les ignorer. C'est ainsi que viendront le visiter tour à tour le fantôme des noëls passés, le fantôme des noëls présents et le fantôme des noëls futurs. Et nous plongeons la tête la première dans cette aventure incroyable qui transformera ce bougre de Scrooge.
J'ai lu ce livre plusieurs fois, et à chaque fois c'est comme un grand bol de lait chaud au miel un soir d'hiver. Un livre qui fait du bien, empli d'humanité et d'espérance en l'âme humaine.
Adapté au cinéma, entre autre avec Jim Carrey, en dessin animé, Scrooge est une sorte d'Onc' Picsou avant l'heure (d'ailleurs le célèbre oncle de Donald le canard de Walt Disney s'appelle Uncle Scrooge en anglais) qui sera également parodié par Rowan Atkinson (Mr Bean) dans un épisode spécial de Black Adder (la vipère noire) avec un certain Hugh Laurie (avant Dr House).
Voilà. Si vous voulez apaiser votre cœur, un peu de douceur, je vous conseille de lire Un conte de Noël, de l'immense Charles Dickens.
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Le portrait de Dorian Gray - Oscar Wilde
J'ai relu "Le portrait de Dorian Gray", d'Oscar Wilde.
L'avantage, quand on a une mémoire de poisson rouge, c'est que l'on peut relire un livre ou revoir un film comme si c'était la première fois.
Après le Faust de Goethe, on se retrouve dans le mythe de l'éternelle jeunesse contre une force démoniaque. Tout a un prix.
Bon, attention, je spoile (je dévoile une partie de l'intrigue ce qui peut vous gâcher le plaisir de la découvrir par vous-même) un peu, beaucoup, passionnément, à la folie...
Donc, Dorian est un beau gosse, qui fait craquer tout le monde, filles et garçons. D'ailleurs, il me semble avoir lu qu'Oscar Wilde a été contraint d'adoucir les références homosexuelles de la version originale, pour ne pas troubler les bonnes mœurs en vigueur.
Il pose comme modèle pour Basil, un peintre littéralement fasciné par l'apollon. Et se laisse lui-même entraîner par Lord Henry, un ami du peintre, encore plus fasciné, qui le flatte tant que Dorian en tombe jaloux de son propre portrait.
Un souhait, un vœu lancé à la légère, et voilà que le portrait vieillira à la place de son modèle, autant physiquement que moralement.
Comme le docteur Faust, Dorian Gray séduit une superbe demoiselle et la jette comme un kleenex quand la passion a disparu.
Comme dans Faust, la malheureuse ne s'en remettra pas. Mais l'éternel jeune homme est déjà parti ailleurs, obsédé par son portrait qu'il cache comme un trésor, au point de l'enfermer à clef dans une pièce.
La jouissance devient sa raison d'être, après la lecture d'un roman que lui a offert Lord Henry. Mais la folie le guette, son portrait occupe toutes ses pensées.
Le jour où Basil vient lui tirer les oreilles, Dorian lui révèle son terrible secret, ce qui coûtera la vie au pauvre peintre.
Je passe sur le suicide d'Alan Campbell, une sorte de Victor le nettoyeur avant l'heure - ou plutôt un genre de Winston Wolf - et sur la chance de rédemption qui lui est offerte par la mort de celui qui voulait sa peau pour venger sa sœur, et me voilà à vous raconter la scène finale.
Dorian veut assassiner son portrait, car malgré sa décision de devenir quelqu'un de bien, la peinture reste vieille et laide. Et alors... ben, j'en ai déjà beaucoup trop raconté !
Mon interview mensonge d'Alexandre Jardin.
J'ai lu le dernier livre d'Alexandre Jardin, sorti le 5 juin dernier. J'avais rendez-vous avec lui dans un café parisien, ce matin à huit heures, pour l'interviewer, il n'est pas là. Pour tuer le temps, je lis son livre. Et je comprends pourquoi il ne vient pas. Il m'a menti tant de fois. J'ai lu presque tous ses livres, et j'ai cru ce qu'il m'a raconté. Et là, je réalise qu'il m'a menti. Faute avouée est à moitié pardonnée, me direz-vous. Peut-être. Mais n'empêche. Il me faisait rêver. Toutes ces anecdotes dingues qui me rendaient espoir lorsque je me sentais mourir. Sa folie, héritée de celle de son père, le génial Pascal Jardin, auteur du film Le vieux fusil, entre autres, me sautait en pleine face à chaque chapitre, et me revitalisait d'espérance. Une chose me déplaisait chez lui, quelque chose de pas naturel, à chacun de ses passages en télévision ou en radio. Son rire. Son rire faux, son rire excessif, son rire mal placé, pas calé, pas synchro. Pourquoi rit-il, me disais-je parfois ? Il gâche tout avec ce rire.
Aujourd'hui, il avoue que j'avais bon. Son rire était en effet un masque d'hilarité qui camouflait un profond malaise. Mais voilà que je le vois entrer dans le café, avec une bonne heure de retard. Il me regarde et comprend que c'est moi. Il ne m'a jamais vu. Il s'excuse de son retard. Il cherche une excuse bidon, il hésite, il allait peut-être me dire qu'il a escaladé nu la façade ouest de l'hôtel George V, un bouquet de roses entre les dents, pour faire irruption par la fenêtre de la suite royale dans le lit d'une princesse indienne et lui faire l'amour par surprise, et finalement il se ravise.
- J'ai pris le train, David. Désolé, tu connais la SNCF.
Évidemment, je sais qu'il ne me ment pas sur ce coup. Je lui dis que j'en étais à son fameux rire. Il commande un café, s'installe et me dit : " J'en avais assez de rire pour atténuer ma vieille dépression. Pour ne plus être secoué par ce rire mécanique, qui au fond était un triste grincement, j'ai formé le rêve de découvrir mon rire léger, véritablement heureux, mon émotion réelle, et mon goût simple pour la vie. "
- Fais-voir ce que ça donne ton rire léger pour voir.
J'ai pris la liberté de le tutoyer, alors que lorsque je lui parle sur les réseaux sociaux je le vouvoie. Mais là il est là pour moi, en intime. Il esquisse un rire timide. J'aime bien. Je lui demande pourquoi il a raconté tant de fariboles sur sa vie, sur son père, sa mère, sa famille.
- Je me suis fabriqué des souvenirs imaginaires, mais la seule vérité c'est que mon père me manque à chaque seconde.
Putain, il va me foutre le cafard. Où est passé le fou génial pour qui rien n'est jamais grave ? Alexandre Jardin serait donc un homme qui souffre, comme tous les autres ? Il boit son café, grignote un morceau de croissant, et je le regarde, et je me dis qu'il est beau, et que je le vois en vrai.
- Le coup du chèque dans le bottin d'une cabine téléphonique laissé par ton père pour qu'un inconnu le trouve et l'encaisse, c'était faux ?
- Pure invention.
- Et ta grand-mère qui s'endormait la fenêtre ouverte pour qu'un cambrioleur pénètre dans sa chambre et lui fasse l'amour ?
- Mensonge.
Je lui dis que finalement je m'en fous, que je ne vois pas où est le problème de romancer sa propre vie, surtout quand on est un romancier professionnel.
- Tu sais que j'ai dansé la valse avec Elvis Presley ?
Je vois qu'il hésite, qu'il tente de deviner mon âge, celui que j'avais en 1977, année de la mort du King. J'avais neuf ans, c'est crédible.
- Je me suis battu avec le diable, déguisé en Superman, j'ai fait l'amour avec Mylène Farmer, j'ai fait le pèlerinage à Saint-Jacques de Compostelle en plein mois d'août 2003, et un jour, alors que je n'avais plus une goutte d'eau dans ma gourde, Jésus m'est apparu avec une bouteille de Cristalline. J'ai arrêté un pénalty de Delio Onnis, je suis le producteur du dernier album de Jean-Patrick Capdevielle, et j'ai dîné avec Jean-Louis Aubert, après qu'il ait assisté à une de mes pièces de théâtre.
- Toi aussi t'es un bon affabulateur, David.
- Presque. Pour dire toute la vérité j'ai vraiment valsé avec Elvis, mais dans un rêve. J'ai fait le pèlerinage à Santiago, mais aucune trace de Jésus. Je n'ai pas arrêté le péno du Goléador, mais il l'a vraiment tiré alors que j'étais en face de lui dans les cages. Je n'ai jamais fait l'amour avec Mylène Farmer, sauf dans mes fantasmes d'adulescent. J'ai participé au crowdfunding du dernier album de Capdevielle. Et j'ai vraiment dîné avec Aubert après une de mes pièces qu'il était venu voir. Mais quoi, qu'est-ce que ça peut faire que ce soit vrai ou faux ? Aujourd'hui tout cela a la même consistance, impalpable, invérifiable. Le tout c'est que ça fasse du bien d'y penser.
Je vois bien que je le scotche. Il me regarde, bouche bée. Il esquisse un sourire.
- Je me suis fabriqué au fil des ans une famille complémentaire qui vit sur mes étagères.
C'est la seule chose qu'il trouve à me dire. Je lui fais remarquer qu'elle vit sur les miennes aussi. Avec mon recueil de poèmes dédié aux femmes de ma vie, édité chez Publibook en 2003, vendu à vingt-cinq exemplaires à ma famille et à mes amis.
- Je vais l'acheter, me dit-il. Quel en est le titre ?
- Pages d'une vie. Tu le trouveras sur Amazon, ou sur le site de l'éditeur. Il est signé de mon vrai nom. Je t'en aurais bien offert un, mais j'ai donné mon dernier exemplaire à Jean-Louis Aubert pour qu'il en fasse des chansons, un soir de beuverie chez Houellebecq.
Et nous voilà, Alexandre et moi, autour de cette table de bistro, à papoter pendant des heures, de la pluie, du beau temps, de politique, et de poésie. Ce mec est un romancier, mais il est surtout un magicien des mots, un sorcier, un ange. Je ne suis pas convaincu qu'il soit vraiment guéri. Je l'ai vu dans Quotidien, sur TMC, je ne suis pas sûr qu'il ait dit la vérité. Un menteur qui avoue être un menteur, est-ce vraiment un menteur ?
- Tu sais, Alex - tu permets que je t'appelle Alex ? - je crois qu'il ne faut pas attendre des menteurs qu'ils se débusquent eux-mêmes. Mais ce serait bien que les journalistes politiques arrêtent un peu d'être complices de ceux qu'ils interviewent, et qu'ils leur mettent le nez dans leur caca. Pardon. J'avais besoin de le dire, ça me démangeait.
- Pas de problème Dav' - tu permets que je t'appelle Dav ' ? - je suis de ton avis.
Je vais bientôt prendre congé de ce double-cœur, de ce colorié, de ce zèbre, de ce gaucher sorti d'une île, de ce citoyen faiseux qui est loin de n'être qu'un rêveur, tant ses actions pour les enfants, les vieux, les taulards, les vraies gens, sont bien réelles.
- Je voudrais te poser une dernière question. Desproges a dit que l'on peut rire de tout mais pas avec tout le monde. Penses-tu que l'on puisse être vrai avec tout le monde ?
- Ne meurs pas de ton vivant. Sois semence de ta vérité. Partage ton roman vrai avec ceux qui méritent ton cœur.
Il a dit ça en se levant, il a laissé un bifton sur la table pour les consos, et il est parti en m'offrant un putain de beau sourire sincère. Je le regarde s'éloigner, et disparaitre tel un mirage du désert. Était-il vraiment là avec moi ? Ce billet, n'est-ce pas le mien ? Mais quoi, qu'est-ce que ça peut faire que ce soit vrai ou faux ? Tout cela a la même consistance, impalpable, invérifiable.
Le tout c'est que ça fasse du bien d'y penser. J'ai oublié de lui dire que peu m'importe qu'il ait dit la vérité. Ce qui m'importe, c'est la vérité que ses écrits me procurent. Chaque livre d'Alexandre Jardin me fait du bien, parce que dans ses livres, la vie est belle.
- Alexandre, n'oubliez pas l'essentiel. Vous êtes là pour écrire des livres qui me font du bien à moi. Et si ce n'est pas le cas, vous pouvez jeter votre manuscrit dans l'âtre de la cheminée. Pour de vrai cette fois-ci. Et vous remettre à l'ouvrage.
Merci pour ce moment.
Bernard Werber, la possibilité d'une île
Plus on essaie de rentrer dans le moule, plus on ressemble à une tarte.
Ce n'est pas le principal message que je retiendrai de cette journée Master Class Bernard Werber au Chalet des Iles du lac inférieur du Bois de Boulogne, mais quand même, ça donne le ton.
Nous étions entre cinquante et soixante joyeuses et joyeux luronnes et lurons, et ce fut une fantastique journée.
Après un après-midi aux Feux de la Rampe au mois de mai, une journée sur une île en juillet, quel sera le programme de la prochaine rencontre ?
Je ne sais pas si Werber est un homme gentil, mais il parle avec douceur, il est bienveillant, humble, et nous donne envie de donner le meilleur de nous-même.
C'est un des plus grands écrivains français du siècle, et il nous laisse partager son expérience, son savoir, et se nourrit de nous autant qu'il nous laisse nous nourrir de lui dans ces moments d'une rare humanité. Il suffit de traverser le lac, même pas besoin de donner la pièce au passeur. Petit déjeuner en terrasse dans un petit paradis.
Si Gibraltar était un détroit, qui sont les deux autres ? Cette fois-ci on est passé du coton-tige au GPS, avec l'île en bouée de sauvetage. Chercher à savoir qui nous sommes vraiment. Et que notre héros fasse la même chose.
Les yeux dans les yeux, deviner le métier, le défaut, le grand secret ou le fantasme sexuel de l'illustre inconnue qui nous scrute dans le même but. Quoiqu'il arrive, toujours faire avancer le héros dans l'intrigue. Comme dans la vie finalement, toujours avancer. Comme sur les Chemins de Compostelle, toujours vers l'ouest, sans se retourner.
S'inspirer d'histoires vraies, comme pour Le Comte de Monte Cristo ou La Belle et la Bête et l'homme mi-singe Pedro Gonzales. Faire un plan anatomique du roman, son squelette, ses organes, ses muscles et sa peau.
Il ou Je ? Présent ou Imparfait ? L'incipit, on doit se faire chier toute une vie sur une île.
Les dialogues et les bonnes formules. Ecrire sans réfléchir ou sur la musique de Waterworld.
L'excipit, en la regardant une dernière fois, je me souvins de la première fois, et ce fut la dernière fois que je la vis. Je ne l'ai pas dite au micro celle-là, je n'ai pas osé.
Se faire sa propre encyclopédie du savoir relatif et absolu.
Entretemps on a déjeuné, et puis après on s'est fait virer de la salle, et on a fini sous un arbre au bord de l'eau. Bernard et ses fourmis, il faut le vivre tellement c'est bon. Formidables fourmis que j'ai pris plaisir à découvrir, regarder, écouter. Une réconciliation avec l'humanité, moi qui pense de plus en plus que dire de quelqu'un qu'il est humain est une insulte tellement les humains démontrent chaque jour qu'ils sont plus haïssables que la veille.
Je vais dessiner un plan du roman que j'ai commencé à écrire après la Master Class des Feux de la Rampe. J'avais retenu le message principal adapté à ma lacune principale : quoiqu'il arrive, écrire jusqu'au mot FIN.
Depuis j'avance, mon héros aussi, toujours vers l'ouest. J'ai acheté un jeu de tarot de Marseille, j'ai regardé un vieux film de Rocambole sauvé des eaux par son auteur sur le site de l'INA, j'ai rangé mon Houellebecq et j'ai trouvé une vieille édition de la première traduction française d'Animal Farm de George Orwell. La ferme des animaux s'appelait Des animaux partout en 1947. Merci à Raphaël Enthoven pour le tuyau. Napoléon s'appelait César. Aujourd'hui on l'appellerait Jupiter.
Allez, il est bientôt l'heure de dormir et de rêver à mes fantômes et autres farfafouilles.
Tout prend forme. Il n'est jamais trop tard. Je croyais que c'était moi le dieu des fourmis quand j'étais petit, mais j'avais tort.
Moi je ne suis qu'une fourmi.
Werber, c'est un mec bien !
Bernard Werber, retour d'expérience
Donc quoi ? Je voulais y aller, j'vous jure, mais j'ai quand même failli mourir la veille !
Des papillons dans les yeux, le cœur oppressé, des frissons sur tout le corps, les jambes lourdes, l'envie de vomir, j'étais à l'agonie, moi, aux portes des enfers, sur les berges du Styx, je devinais au loin dans la brume la barque de Charon qui s'approchait pour me faire embarquer et m'emporter, et je n'avais même pas de monnaie sur moi, pas la moindre pièce d'or. Et ma tenue de thanatonaute était encore au pressing.
Déjà ma chatte noire se pourléchait les babines de sa langue râpeuse : Miaou. Je porte le deuil cinq ou six minutes et je le bouffe. Il me gave quotidiennement de croquettes dégueulasses et m'octroie de temps en temps une coupelle de Sheba. Sérieux je le bouffe !
Ma femme m'a dit : vas-y, sinon tu vas le regretter. C'est bien pour lui faire plaisir que j'y suis allé. C'est pas que je voulais pas, je voulais y aller, j'vous jure, mais j'ai quand même failli mourir la veille.
Bon j'y suis allé. Parce que ma femme a toujours raison, je dois bien l'admettre. Depuis le temps que je la connais, je la connais. J'étais pas en belle forme, c'est sûr. La voiture, le train, le métro, le vélib ; sans dec, j'avais vraiment envie d'assister à cette master class.
Y'a du monde qui fait la queue. C'est sûr tout ce monde c'est pour lui. J'ai demandé je confirme c'est pour lui. Les Feux de la Rampe. C'est un théâtre. On rentre on s'installe le maître entre en scène. Nature. Cool. Sympa.
Le mec il vend des millions de livres dans le monde entier et il se présente peinard sur une scène parisienne un samedi aprèm caniculaire devant 130 illuminés à qui il va refiler la recette de sa potion magique pour quarante balles TTC. Cool je te dis.
Il nous donne plein d'astuces pour devenir des romancières et des romanciers, pas forcément célèbres, mais au moins crédibles, mais surtout qui sachent écrire jusqu'au mot FIN. Il nous fait même participer, c'est vivant, énergique, drôle, c'est bourré de talents dans cette salle.
Ah non je dis rien, aucun résumé, c'est entre Bernard et nous. Pas Bernard Hinault, me prends pas pour un blaireau, Bernard et nous !
Trois heures après, fin du cours, la cloche sonne, c'est les vacances, vous les copains je n'vous oublierai jamais.
Mais crois-le, ou crois-le pas si tu veux je m'en fous, mais master Werber ne nous lâche pas. Tel le joueur de flûte de Hamelin il nous entraîne jusque dans un parc de la ville. Faut nous voir le suivre comme des fourmis disciplinées, en colonne au pas dans les rues de Paname. Je me sens comme Z du dessin animé, plus cigale que fourmi, au milieu de dizaines formicidae soldats, engagé volontaire dans une guerre perdue d'avance contre les terribles termites.
Bernard Werber reste avec nous, il ne peut plus se passer de nous, incroyable ! Quand on veut partir il s'accroche à nous, se traîne par terre dans la poussière, il m'a serré si fort la cheville droite que j'en ai failli la perdre par manque d'irrigation sanguine. J'en ai encore les stigmates, je vous ferai voir un jour. Il a insisté pour faire des photos, des selfies, et pour nous signer des livres.
Alors là je l'ai bien eu, je lui ai fait dédicacer un roman de Houellebecq.. une prouesse ! La possibilité d'une île. Comme quoi. Tout est possible. Il veut absolument que l'on se revoit. Tous !
Je crois bien qu'il est fou. J'ai profité d'un de ses rares moments d'inattention pour m'éclipser. J'ai filé. Vélib, métro, train et voiture, je suis rentré à la maison.
Werber c'est un mec en or. J'ai remercié ma femme. C'est une pierre précieuse. Un joyau. Je crois que je suis amoureux d'elle. Merci Bernard !
Donc ça !